
Spécialiste des questions de finances publiques et « Monsieur Propre » de la classe politique, le député de l’Aisne René Dosière fait dans « Argent, morale, politique » (Seuil) plusieurs propositions de bon sens pour la moralisation de la vie publique.
Député depuis 1988 (avec une interruption entre 1993 et 1997), René Dosière est à 75 ans l’un des « anciens » de l’Assemblée nationale. Il a décidé, comme un tiers des députés de la majorité socialiste sortante, de ne pas se représenter aux élections législatives du mois prochain, afin de contribuer au renouvellement de la classe politique.
Cela lui donne un surcroît de liberté pour traiter sans concession de la question du manque de transparence de la vie politique française, même s’il s’était déjà illustré en la matière auparavant, avec en 2007 un ouvrage sur L’Argent caché de l’Élysée.
Dans ce nouveau livre, René Dosière dresse d’abord un véritable testament politique, retraçant un parcours marqué par le souci croissant de la lutte contre les gaspillages d’argent public (on lui doit également L’État au régime, paru en 2012). L’élu picard propose par la suite un ensemble de mesures à laquelle la majorité parlementaire (et gouvernementale) qui sortira des urnes en juin serait bien inspirée de trouver une application législative.
« En finir avec la “carrière politique” »
Citons notamment les principales d’entre elles, rassemblées dans sa conclusion (opportunément intitulée « Pour une politique morale ») : généralisation du mandat unique et, corollaire, suppression du cumul des indemnités, limitation des mandats dans le temps, et plus fondamentalement « en finir avec la “carrière politique” » en « limitant le nombre des “professionnels de la politique” ». Des mesures également proposées par Contribuables Associés dans notre Livre Blanc « Contre la corruption, le remède de la transparence ».
Il est rare d’être totalement d’accord avec un auteur, et nous ne suivrons pas René Dosière dans sa défense du financement public des partis politiques et des campagnes électorales. Si l’affaire Bygmalion a bien servi à quelque chose, c’est à montrer que le financement public des campagnes est à la fois déresponsabilisant et propice aux pires abus. Le rejet du compte de campagne de Nicolas Sarkozy par le Conseil constitutionnel a eu le mérite de faire financer sa campagne présidentielle de 2012 par les militants et sympathisants.
Pourquoi ne pas généraliser cette pratique vertueuse bien qu’involontaire ? Les dérives liées au financement des micro-partis, dont Dosière traite abondamment, ne pourraient se produire si celui-ci n’était pas assuré par l’État, et in fine par le contribuable.
L’angle mort du niveau élevé d’indemnisation des élus
Autre critique : la défense par l’élu de Laon du niveau élevé des indemnités attribuées au président de la République, aux membres du gouvernement et aux parlementaires. Ce qui ressort de l’observation attentive de la vie politique française, c’est que le niveau de rémunération des élus doit être considérablement revu à la baisse.
Mais ces deux réserves, aussi sérieuses soient-elles, sont largement compensées par la vertu principale de l’ouvrage qui est de prôner sans ambiguïté une gestion du denier public dans l’intérêt de ceux qui l’abondent, et non de ceux qui en bénéficient. Si toute la classe politique pensait, parlait et agissait comme René Dosière, il n’y aurait pas besoin d’un Observatoire de la Corruption.