En ne comptant pas l’indemnité représentative de frais de mandats dans leur rémunération, Henri Guaino et Gérard Collomb désinforment les Français, qui ne connaissent pas le niveau réel des indemnités des élus.
Ces derniers jours, deux déclarations de parlementaires ont fait polémique.
C’est d’abord Henri Guaino, député LR des Yvelines, qui a affirmé qu’il n’arrivait à « rien » mettre de côté avec son indemnité de parlementaire, qu’il minore en l’évaluant à 5100 euros par mois :
Puis c’est Gérard Collomb, sénateur-maire PS de Lyon, qui, du fait du cumul de son mandat parlementaire avec la gestion de la deuxième métropole de France, est extrêmement peu présent au Sénat, ce qui lui a valu des pénalités financières. Se plaignant de vivre un « cauchemar », il dit être tombé à 4000 euros par mois.
Mais les deux élus omettent soigneusement de mentionner qu’en complément de leur indemnité de base, ils touchent chacun une indemnité représentative de frais de mandat (IRFM), de 5770 euros par mois pour le député Guaino, et 6037 euros par mois pour le sénateur Collomb.
Cette enveloppe, qui échappe aux cotisations sociales, aux impôts et même à toute espèce de contrôle, fait partie de la rémunération du parlementaire puisque celui-ci conserve le trop-perçu par rapport à ses frais réels.
Or, dans les deux cas du maire de Lyon et de l’ancien conseiller spécial de Nicolas Sarkozy, les frais sont quasi inexistants puisque le mandat n’est, dans les faits, pas exercé (tout comme Gérard Collomb, Henri Guaino est un parlementaire extrêmement absentéiste).
Le système opaque de l’IRFM permet donc à certains parlementaires peu scrupuleux de mentir sur leur rémunération, ce qui leur donne ensuite l’occasion de dire, comme Henri Guaino, qu’ils sont « très mal payés » (sic), ou, comme le député-maire de Crest (Drôme) Hervé Mariton lors de la législature précédente, qu’ils touchent « le salaire d’un cadre moyen » (sic aussi).
Il y aurait pourtant une solution à ce problème, et ce serait la transparence des frais de mandat, proposition de longue date du député UDI de la Marne Charles de Courson (et de Contribuables Associés), qui a toujours été rejetée, quelle que soit la majorité (UMP ou PS) :
Partisan du statu quo et de l’opacité, Henri Guaino estimait, lors du rejet de l’amendement Courson par la majorité PS en 2012, qu’« un député obligé de justifier ses frais [ne serait] plus libre », une déclaration sans fondement, comme le montre l’exemple britannique, où les parlementaires doivent avancer leurs frais puis se les faire rembourser sur preuve, en toute transparence mais aussi en toute liberté puisque tous les frais justifiés sont remboursés :
La situation n’a pas toujours été celle-ci Outre-Manche. Jusqu’en 2009, c’était, comme en France, l’opacité qui prévalait. Il a fallu les révélations du Telegraph sur l’utilisation des frais à des fins privées, puis la démission d’une centaine de parlementaires et même l’incarcération de plusieurs d’entre eux pour que la transparence devienne la règle. Faudra-t-il un scandale similaire pour que la France s’inspire de son voisin du Nord-Ouest ?