Béatrice Négrier

Mise à jour, jeudi 25 août : mercredi, Béatrice Négrier a démissionné de la vice-présidence du Conseil régional d’Occitanie. Elle reste néanmoins conseillère régionale, avec les indemnités afférentes (2661 euros brut par mois). Quant à sa condamnation très clémente, elle est définitive.

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Où l’on reparle du sans-abri condamné par le tribunal correctionnel de Cahors (Lot) à deux mois de prison ferme pour avoir volé un paquet de pâtes et un paquet de riz à l’étalage.

Le blog politique de France 3 Occitanie compare cette sévère condamnation avec celle, bien plus clémente, de seulement 4000 euros d’amende, un abattement de 20% de la somme à payer si celle-ci est réglée dans un délai d’un mois (soit 3200 euros d’amende) et aucune inscription au casier judiciaire pour Béatrice Négrier (photo), une vice-présidente du Conseil régional d’Occitanie reconnue coupable du détournement de 356.415 euros à son profit personnel.

Comme l’écrivent les deux journalistes, « le décalage est troublant et même choquant ».

Lorsque le sans-abri avait été condamné, l’humoriste Stéphane Guillon avait jeté un froid sur le plateau du Grand Journal de Canal+ en comparant la situation du SDF avec celles, plus heureuses, de Jérôme Cahuzac, Patrick Balkany et Claude Guéant.

Se retranchant derrière son imitation de l’acteur-provocateur Fabrice Luchini, Guillon citait la fable de Jean de La Fontaine Les Animaux malades de la peste pour en conclure que depuis le XVIIe siècle, « rien n’a changé » :

« Évidemment ça choque ! Deux mois de prison pour un paquet de pâtes, t’imagines, le gars a faim, il pique des pâtes on l’enferme, c’est énorme ! À côté de ça y a des vrais voyous, des raclures, Cahuzac, Balkany, Guéant ! Plusieurs centaines de milliers d’euros blanchis, détournés, les gars jouent au golf, paradent dans les magazines, ils sont encore en poste, c’est inouï ! Le fils de Laurent Fabius, délit de fuite, trois millions d’euros détournés dans un casino à Vegas, rien, pas un blâme, Papa est ministre, on étouffe l’affaire !

Trois millions d’euros, problème de CP : si un paquet de pâtes à deux euros entraîne deux mois de prison, combien d’années de détention le fils Fabius devrait-il tirer pour avoir piqué trois millions ? Là c’est du lourd ! On divise les euros par les paquets de pâtes, et on multiplie par deux. Ça fait 250.000 ans de prison, t’imagines ! Rien n’a changé ! C’est le XVIIe siècle, Thierry Ardisson. La Fontaine, l’immense La Fontaine : “Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir.” Rien n’a changé. Évidemment, rien n’a changé ! »

À noter que, comme le relèvent les journalistes de France 3 Occitanie, Béatrice Négrier a échappé à une inscription au casier judiciaire simplement… parce qu’elle l’a demandé au juge.

Si la proposition de Philippe Pascot (auteur de Pilleurs d’État et intervenant lors de notre 46e Rendez-Vous parlementaire du Contribuable consacré à la corruption) d’exiger un casier judiciaire vierge pour pouvoir se présenter à une élection était adoptée, Béatrice Négrier pourrait donc se représenter, en dépit du détournement de plusieurs centaines de milliers d’euros d’argent public.

Ci-dessous, notre interview de Philippe Pascot, qui explique pourquoi cette mesure serait à son sens préférable à la proposition de loi des députés Dino Cinieri (Loire) et Pierre-Morel-À-L’Huissier (Lozère), qui prévoit la possibilité d’une peine d’inéligibilité à vie pour les élus corrompus :

Notons pour être complet que, si c’était la proposition de loi des deux députés qui venait à être adoptée, le problème se poserait aussi : en effet, une condamnation d’inéligibilité à vie serait, en vertu du principe de l’individualisation des peines, à la discrétion du juge. Le même juge aurait donc pu absoudre Béatrice Négrier de la même façon.

Outre la réponse législative et judiciaire, la moralisation de la vie politique ne devrait-elle pas aussi être le fait des partis, qui garantiraient que des élus coupables de faits aussi graves ne puissent plus exercer de mandat public ? C’était l’un des engagements du candidat François Hollande en 2012.

Observatoire Corruption

Contribuables Associés contre la corruption et pour la transparence de la vie publique.