Ces jours-ci se discute au Parlement un projet de loi du nom du ministre des Finances et des Comptes publics, Michel Sapin. Censée permettre la transparence de la vie économique, cette loi va surtout renforcer la tutelle de l’État sur le secteur privé, sans pour autant permettre de lutter efficacement contre la corruption.
Depuis l’affaire dite des « Panama Papers » en avril, le thème de la transparence de la vie économique s’est imposé dans le débat public. À tel point que celui de la transparence de la vie politique, qui serait pourtant le premier garde-fou à la corruption, est à peu près oublié des débats.
Or, s’il y a un domaine dans lequel la transparence devrait être la règle, c’est dans la vie publique, puisque les décisions prises et les dépenses qu’elles impliquent concernent l’ensemble de la collectivité.
À l’inverse, la transparence de la vie privée, et donc aussi des affaires économiques, pose problème, puisqu’elle implique une vulnérabilité des individus et des entreprises par rapport au contrôle de l’État :
Dès le départ, la loi Sapin 2 traduit la volonté du gouvernement de jeter la suspicion sur l’ensemble de l’activité économique, supposée sujette par nature aux dérives, tandis que l’activité politique, étant menée au nom de l’intérêt général, en serait a priori exempte.
Traitement de faveur pour les syndicats de salariés et de fonctionnaires
Cette logique a été portée à son comble par un amendement des députés établissant que si les syndicats d’employeurs (Medef, CGPME) devront, comme les autres groupes de pression et d’influence, s’enregistrer auprès de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) pour pouvoir défendre leurs intérêts auprès des élus et des pouvoirs publics, les syndicats de salariés et de fonctionnaires pourront se soustraire à cette exigence, étant censés représenter par nature l’intérêt général, comme le notait récemment le Bulletin d’André Noël dans son éditorial (cliquez ici).
Or, comme l’avait pointé Anticor dans son analyse du projet de loi avant sa discussion à l’Assemblée nationale, au départ, tous les syndicats étaient concernés par cette obligation. L’amendement des députés est d’autant plus surprenant qu’il intervient dans un contexte où des syndicats comme la CGT, mais aussi FO, font clairement pression sur l’ensemble du corps politique et économique pour défendre des intérêts purement catégoriels.
Dans la même logique, échappent à toute suspicion les services de l’État et leurs agents, en dépit de leur grande influence sur la vie économique, notamment lors de l’attribution de marchés publics.
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S’il est un apport de la loi à célébrer, en revanche, c’est l’inscription dans la loi d’une peine complémentaire d’inéligibilité obligatoire pour les élus condamnés pour corruption.
Si cette disposition de la loi ne va pas aussi loin que ce que demande Contribuables Associés depuis 2014 (l’inéligibilité à vie), il y a incontestablement une avancée, à laquelle notre association a grandement contribué en portant la première le sujet sur la place publique.