L’ancien député Julien Dray fait plusieurs propositions sur le statut du parlementaire qui rejoignent les nôtres. Malgré quelques bémols.
Nous vivons décidément une époque pleine de surprises, et pas toujours mauvaises. Jeudi, Julien Dray (lui-même) a fait quatre propositions sur le statut du parlementaire. Elles font écho à celles que nous avançons dans notre Livre Blanc « Contre la corruption, le remède de la transparence ».
- « Interdire aux parlementaires toute autre fonction que la leur, sauf à titre gratuit. » Député ou sénateur sont, ou plutôt devraient être, des mandats à plein temps. Débattre et voter la loi et le budget, contrôler le pouvoir exécutif, évaluer les politiques publiques, tout cela nécessite un investissement à temps complet. Son indemnité en est la contrepartie. Julien Dray propose que les parlementaires voulant continuer à exercer une activité professionnelle pourraient le faire, mais bénévolement. Allons plus loin : on pourrait imaginer un système inverse, où l’indemnité du parlementaire serait réduite à proportion des revenus annexes. Un parlementaire qui gagnerait autant ou plus que son indemnité (y compris l’indemnité représentative de frais de mandat, l’IRFM) exercerait son mandat à titre gratuit. Cela permettrait, par exemple, d’en finir avec l’aberration des indemnités versées à Serge Dassault au Sénat et Olivier Dassault à l’Assemblée nationale.
- « Aucune possibilité d’employer des membres de la famille ». C’est le cas au Bundestag allemand ou au Parlement européen. L’Affaire Fillon a mis sur le devant de la scène le népotisme qui sévit dans les deux chambres du Parlement. Une pratique qui, même si l’assistant(e) travaille effectivement, est inacceptable. Inacceptable car elle consiste pour un parlementaire à puiser dans l’argent public issu des impôts payés par les contribuables pour en faire profiter sa famille.
- Faire des assistants des salariés des deux chambres, et non des parlementaires. Cette mesure, complémentaire à l’interdiction du népotisme, aurait pour mérite de clarifier le statut de l’attaché parlementaire. Et de garantir une réelle transparence en la matière.
- Faire des permanences les propriétés du Parlement, et non des parlementaires. Des dizaines de parlementaires ont en effet utilisé leur IRFM pour acheter leur permanence. Et se constituer ainsi un parc immobilier indu, puisqu’il s’agissait en principe de frais de mandat.
Bien rémunérer les élus ne les prémunit pas de la corruption
Là où pèche l’analyse de Julien Dray, c’est sur l’idée tout aussi fausse que répandue selon laquelle il faudrait accorder une rémunération élevée aux parlementaires pour les préserver de la corruption. Il parle de 9000 euros net mensuels + 3000 euros de frais. Nous proposons que ce montant soit sensiblement réduit. Nous avons déjà expliqué pourquoi l’argument de Julien Dray relève du sophisme :
Cette idée relève du sophisme car elle implique qu’il existerait une limite matérielle à la corruptibilité. Or, aucune limite de ce type n’existe : la minorité d’élus corruptibles ne sera pas arrêtée par le fait qu’elle est déjà généreusement rémunérée.
Notons pour finir que :
- Julien Dray ne parle pas de l’opacité des frais de mandat représentée par l’IRFM. Il ne parle donc pas du gonflement de la rémunération réelle des parlementaires qu’elle entraîne.
- Il ne parle pas non plus de l’absentéisme endémique au Parlement.
- Rien non plus sur le cumul des mandats, qui va perdurer, quoique dans une moindre mesure, malgré la loi d’interdiction (partielle) du cumul.
- En revanche, Dray se dit favorable au casier judiciaire vierge pour les élus.